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ChapitreI

De l'homme, du vrai

"le va-t-en guerre y faut y aller qui
bouff' de la géographie" 2

L'armée est l'institutionnalisation de la raison par la force. De cette simple
proposition découle une logique sélective pour les acteurs et les conduites. La
raison étant une, les corps qui composent l'armée sont tous producteurs et
conducteurs de forces dont la résultante est fictivement incorporée dans la chose
qui raisonne pour tous et gouverne.A faire de l'armée une sorte de corps-outil,
l'utopie politique se complait et, parfois, se berce et s'endort. Mais c'est oublier
que l'outil contient tant de symbolisme que le moindre exercice militaire est en fait
ritualisé. Or la pratique rituelle distingue et fait du corps un outil pensant dont le
pouvoir doit tenir compte. Ainsi, avant de tailler dans la masse des hommes la part
que l'armée doit engloutir, est-il important de décider du statut de ceux qu'on va
juger aptes à devenir des hommes, des vrais.

  1. Du métier à la créance


Avoir une armée permanente n'a pas toujours été ressenti comme une nécessité
pour les nations mais en matière de stratégie, le phénomène de l'escalade oblige très
vite les voisins à imiter et il suffit que l'un commence pour que l'autre essaie de
faire pire.

Montesquieu, témoin de cette fureur nouvelle en établit la pathologie
congestive : "Une maladie nouvelle s'est répandue en Europe ; elle a saisi nos
princes et leur fait entretenir un nombre désordonné de troupes. Elle a ses


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2L. FERRE, "L'homme"

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