|
|
La première déflagration se fit entendre en matière de stupéfiants: l'avènement
de la puissance pharmaceutique inaugurant instantanément l'ère des accoutumances,
elle projeta la question de l'aliment dans le champ de compétence du droit pénal.
Pendant des siècles les rebouteux et les ménagères ont détenu les secrets
empiriques de substances dont la sacralité suffisait à mettre en garde le consommateur
contre toute utilisation abusive. Ce qui ne veut pas dire que les effets hallucinogènes
n'étaient pas recherchés, bien au contraire, de tels effets apportaient la valeur probante
et de l'efficacité du produit et de ses affinités surnaturelles. Cependant, l'excès était
toujours soigneusement évité, il ne s'agissait pas de céder aux inclinations des sens
mais de se rendre meilleur, c'était là matière bien trop sérieuse pour être traitée avec
pusillanimité.
De toutes manières, la loi de tout aliment n'est-elle pas de produire des effets
psychiques ? Le corps repu aspire au sommeil tandis qu'un jeûne prolongé produit des
hallucinations, le chocolat est aphrodisiaque tandis que la menthe stimule l'intellect,
etc... Cette liste de lieux communs contemporains que la médecine amusée offre à la
curiosité de chacun ne demande qu'à être complétée par les inventaires des almanachs.
Toutefois, il convient de s'entendre sur une définition de ces termes de "drogue",
"stupéfiants" , le plus sage étant encore d'employer l'acception courante du mot.
Un Léthé de potions stupéfiantesabreuvait une Antiquité à la recherche de la
panacée. Le thériaqueà base d'opium qui est attribué à un médecin crétois de Néron et
qui fut perfectionné par Galien, était considéré comme souverain pour un nombre
indescriptible de symptômes.
Aussi irrigua-t-il abondamment l'Europe de la Renaissance, en compagnie
d'innombrables succédanées et imitations. Cependant les découvertes et progrès
dépendant trop de l'empirisme, des méthodes furent proposée. Celle de Philippe
Théophraste Bombast de Hohenheim, dit Paracelse, fut lourde de conséquence.
Ce personnage sulfureux qui apprit la médecine arabe (autant dire celle du
diable), diagnostiquait en examinant le corps, se prétendait volontiers alchimiste, aussi
indispensable qu'exécré, proposa d'ériger en une théorie complète les rapprochements
|
|