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Dès le premier ouvrage imprimé, intitulé Le Viandier,

la recette du succès est

posée: il s'agit de reprendre un fonds de préparation déjà célèbres et connues de toutes, qui font office de savoir minimal, et de leur adjoindre un corpusimposant de nouveautés, la renommée des unes garantissant le progrès représenté par les autres.

Car il s'agit pour la ménagère d'être à jour et d'accumuler les formules pour répondre aux innombrables besoins "médicaux" qui surgissent journellement. Aussi, ces recueils mêlèrent-ils indistinctement toutes les modalités du soin, passant insensiblement de la gastronomie à la diététique et à la pharmacologie.

Ainsi, l'éditeur du Cuisinier françaisparu en 1651 écrivait en préface que l'ouvrage tendait seulement"à conserver et à maintenir la santé en bon estat et en bonne disposition, enseignant à corrompre les vicieuses qualitéz des viandes, par les assaisonnements contraires"141

La cuisine était alors encore d'un symbolisme lourd, chaque aliment était polarisé et nécessitait une neutralisation au moyen d'un principe contraire: les viandes sèches devaient bouillir, les viandes humides devaient rôtir, les fruits sucrés et humides être salés, etc... En cuisine comme en médecine, une même logique s'appliquait qui imposait la neutralisation comme un absolu, car la polarité est déjà l'excès, une particularité est déjà un symptôme et une attitude déjà un syndrome.

C'est le règne de la pensée magique, celle qui ne connaît d'analyse que qualitative et pour qui la dose ne compte que pour déterminer celle de contrepoison nécessaire. C'est cette nécessité de savoir accommoder les opposés qui faisait toute la nécessité de maîtriser des recettes complexes à la logique implacable.

C'est dans cet univers d' oppositions sémantiques et quasiment cosmologiques que se tapissent les prototypes du médicament, c'est à dire d'une classe d'aliments dont la fonction de soin finit par déborder celle de nourriture: tels sont les épices, qui avec les condiments et les sauces forment la catégorie des assaisonnements.

Ces aliments sont rarement caractérisés par leur (faible) valeur nutritive, ce sont leurs propriétés gustatives qui en font le principal intérêt, non seulement en gastronomie mais également en diététique: au XIVe Siècle, Magninus de Milan explique dans son Regimen sanitatisque les assaisonnements (condiments, épices et

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141J-L FLANDRINAssaisonnement, cuisine et diététique Histoire de l'alimentationloc. citp 503

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J-L FLANDRIN, M. MONTANARI

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