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Ces relents de pensée magique ont entraîné un sévère encadrement de la dévotion des fidèles dans plusieurs religions. Ainsi le judaïsme prescrit-il un ensevelissement strict de toutes les reliefs de la dépouille91, même si l'idée que le saint reste présent dans sa tombe perdure et que sa piété en fait un intermédiaire privilégié avec Dieu. Une place reste donc vacante pour le développement d'un culte privé, mais borné par les prescriptions de la Loi: les cadavres étant stigmatisés comme impurs92, même la sépulture est concernée et un espace vide isole la tombe93.

Dans l'Occident païen, en revanche, le culte est répandu. Il s'agit autant d'honorer les héros - aussi bien les héros mythologiques que les ancêtres mythiques, ainsi en est-il à Rome des pères fondateurs94et pour Platon des morts pour la patrie - que de guérir les malades, de fertiliser la terre ou de protéger une position stratégique.

Le christianisme dut donc se prémunir contre les comportement analogues, en instituant une propriété indivise de l'Eglise sur tous les saints, la communauté de tous les saints servant d'intermédiaire avec Dieu. C'est la réponse du dogme pour concilier une dévotion des martyrs indispensable à la fédération d'une église naissante et retenir la tentation des cultes magiques.

Ainsi, le culte des morts fut réglementé, en mettant l'accent sur l'inhumation du cadavre plutôt que sur sa crémation95, et en substituant le jour de la naissance à celle de la mort pour les anniversaires. Mais l'instauration d'un culte des martyrs à partir du IIe Siècle96renvoie à la tentation de manducation, l'hommage étant rendu sous la forme d'un repas funéraire97, d'une prière et d'une communion eucharistique.

De plus, le mieux se fit l'ennemi du bien: le souci d'éviter le développement d'un culte rendu aux reliques fut poussé à l'extrême. Chaque parcelle du cadavre devait être soigneusement collectée, pour être minutieusement ensevelie; le sang était récupéré dans des linges ou par des éponges, que l'on plaçait ensuite dans le cercueil. De même pour les instruments ayant servi à la torture des martyrs.

L'infrastructure du culte se mit ainsi en place. Les soins méticuleux qui furent prodigués pour recueillir les moindres parcelles du cadavres afin de les ensevelir et

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91Exode: XIII, 19; Josué: XXIV, 32; Samuel: I, 31; II, 21.
92Nombres: 19,11,13,14-16.
93Le vide étant l'espace du sacré par excellence.
94Surtout Remus, immolé sur le sol romain et donc garant de l'inviolabilité de ses murailles. 95Suivant le principe qu'il vaux mieux faire cuire en terre le corps que de le laisser tout roti, c'est à dire cru, aux tentations opothérapiques.
96155 ap. J-C: E de CESAREE: Histoire ecclésiastique IEditions du CerfParis1986L. IV, c. 15. 97Eloquemment intitulé"refrigerium"

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