1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19

Jean-Pierre BAUD

_____________________________________________________________


système n' a pas été mis en place pour mettre en relations les

choses avec les choses.
Nous verrons ainsi que l'argument essentiel du
grotesque, à savoir que les choses sont en rapport avec les
choses est la négation fondamentale d'une civilité romaine qui
avait organisé les rapports des choses avec les personnes et des

personnes entre elles.
J'invite donc à voir le grotesque, pour qu'on aperçoive
le risible ailleurs. Mais je n'ose inciter à l'indulgence pour ceux

qui ont ri ailleurs.


LE CORPS DANS LES CHOSES


Au début il y eut une bien curieuse chose.
Le spermatozoïde, désormais livré à l'observation de
tous par le microscope et le film scientifique, est une chose bien
étonnante, évoquant un petit animal lubrique cherchant à
s'accoupler avec l'ovule qui, lui, ne ressemble pas à un animal,

mais à une chose molle et provisoirement accueillante.
De la bizarre rencontre de ces choses étranges naîtra un
corps. Et il sera essentiel pour lui de ressembler à l'image qu'on
se fait généralement du corps humain. Sans quoi il risque
beaucoup de ne jamais être reconnu comme une personne
juridique. Le droit ne nous impose plus, comme dans
l'Antiquité, de tuer les monstres à leur naissance, mais une
interprétation laxiste des textes concernant l'avortement
thérapeutique permet de se débarrasser, avant la naissance, de
l'être qui a raté son premier examen, celui de l'échographie,
épreuve particulièrement sévère pour ce qui n'a pas l'apparence
humaine. Même la naissance n'assure pas au monstre une
personnalité juridique : s'il meurt quelques jours après celle-ci,
il y a de grandes chances qu'il soit déclaré non viable et qu'il ne
soit donc pas reconnu comme une personne capable de recevoir